Florian Bézu
FR
Je n'ai aucune idée de l'effet que peuvent produire les œuvres de Florian Bézu sur leurs spectateurs. En se plongeant dans les iridescences de ses céramiques, dans les détails minuscules des altérations chimiques qu'ont subi les objets, les choses imprimées ou les photographies, chacun pourra former son goût. Mais je ne crois pas qu'il s'en soucie : il ne cherche pas plus à séduire qu'à repousser son public, et encore moins à faire son éducation esthétique.
Dans l'introduction de Going public, Boris Groys écrit que « la politique de l'art a moins à voir avec son impact sur le spectateur qu'avec les décisions ayant conduit en premier lieu à son émergence. Cela signifie que l'art contemporain doit être analysé non pas en terme d'esthétique, mais plutôt en terme de poétique. Non pas de la perspective de celui qui consomme l'art, mais de celui qui le produit »[1]. La poétique des œuvres de Florian Bézu est d'une grande cohérence. Elle se constitue dans un ensemble de tensions formelles et symboliques toujours répétées, à l'échelle de ses pièces comme de ses expositions. La lourdeur et la légèreté, le brutalisme et la préciosité, la célébration et la mélancolie, la gourmandise et la toxicité, l'opacité et la transparence, l'empathie et le sadisme, la verticalité et l'horizontalité, la gravité et l'enfance, la beauté et le dégoût, la rocaille et la canaille s'opposent systématiquement (la liste reste ouverte). »
[1] Boris Groys, Going Public, Sternberg Press, Berlin, New York, 2011, p. 15-16
(Extrait du texte écrit par Jill Gasparina à l'occasion de l'exposition Torses à la Galerie Florence Loewy à Paris en 2014)
EN
« I have no idea what effect the works of Florian Bézu may have on their spectators. By diving into the iridescence of his ceramics, in the minuscule details of the chemical alterations to which the objects have been subjected, printed things, or photographs, everyone can form their own taste. But I don't think the artist is worried about that: he is not looking any more to seduce his public than to drive it away, and even less to offer education in aesthetic judgment.
In the introduction to Going Public, Boris Groys writes that “the politics of art has to do less with its impact on the spectator than with the decisions that lead to its emergence in the first place. This means that contemporary art should be analyzed not in terms of aesthetics, but rather in terms of poetics. Not from the perspective of the art consumer, but from that of the art producer”. The poetic, in the works of Florian Bézu is greatly coherent. It is established in a system of formal and symbolic tensions, which are always repeated from the scale of each piece, to that of the exhibition. Heaviness and lightness, brutalism and preciousness, celebration and melancholy, gluttony and toxicity, opacity and transparency, empathy and sadism, verticality and horizontality, seriousness and childishness, beauty and disgust, rocaille and canaille are systematically opposed (the list could go on). »
[1] Boris Groys, Going Public, Sternberg Press, Berlin, New York, 2011, p. 15-16
(Extract from Jill Gasparina's text, written on the occasion of Torses, Florian Bézu's solo show at the Galerie Florence Loewy, Paris, 2014)